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Jacques Prévert traduit en Iran: Entretien avec Maryam Raeesdana

Traduction de 81 poèmes de Paroles par Maryam Raeesdana

Carole Aurouet : Vous êtes traductrice et écrivaine iranienne. Pouvez-vous nous en dire davantage sur vous ?

 Maryam Raeesdana : J’ai déjà publié trois livres sur de l’écrivain iranien Sadegh Hedayat, qui repose au Père Lachaise. Il y a six ans, j’ai écrit une série de nouvelles intitulée Passage, et j’ai obtenu des prix littéraires à Téhéran pour deux d’entre elles : La Chanson de A et Une Île dans le grand Iran. J’ai fait des études universitaires littéraires dans le domaine de la traduction du français au persan. J’ai enseigné à l’université en Iran, dans un collège de filles, et j’ai aussi travaillé dans une maison d’édition à Téhéran. Pour gagner ma vie, je travaille également comme journaliste. Je suis en France depuis 2007. [NDR : A cette adresse vous trouverez le site de Maryam Raeesdana : http://ayandegi.persianblog.ir/]

C.A. : Vous avez traduit Jacques Prévert en persan. Quand et comment avez-vous connu son œuvre ?

 M.R. : Comment ai-je rencontré Prévert ? J’étais en deuxième année de faculté. Pendant un cours de traduction littéraire, une de mes camarades – il n’y avait que des filles dans notre classe à l’université – a commencé à réciter de la poésie. C’était une matinée tout à fait normale, qui s’est transformée en quelques secondes. Cette matinée a pris une tournure complètement nouvelle. L’élève nous déclamait, avec tout son enthousiasme et toutes les fibres de son corps, « Pour faire le portrait d’un oiseau » de Prévert. Depuis cet instant, je ne me suis jamais plus séparée du poète. J’ai commencé à lire ses autres poèmes. Dans chacun, je trouvais une particularité. De ses poèmes d’amour, jusqu’à ses attaques contre les intellectuels. L’année suivante, j’ai traduit « Le Message » et « Déjeuner du matin » qui me semblaient des chefs-d’œuvre quant à leur style, leur esthétique, leur profondeur, les images rares qu’ils offraient. Finalement, à l’occasion d’un voyage à Paris, une amie a acheté un exemplaire de Paroles et me l’a offert de retour en Iran.

C.A. : A quoi avez-vous été sensible pour avoir envie de traduire l’œuvre de Prévert ? Au niveau de l’écriture en elle-même ? Au niveau des thèmes abordés ?

 M.R. : Je crois que le goût de la traduction est inné. De même que l’on ne choisit pas la couleur de ses yeux, l’on ne choisit pas d’être écrivain ou traducteur. Tous les deux coulent en soi, comme le sang. Quand je lis en français quelque chose qui m’attire, j’ai énormément envie de le traduire et de partager ce plaisir avec d’autres. Même si ce n’est que la critique d’un film, comme par exemple Les Chats persans. A vrai dire, c’est seulement quand j’apprends que j’ai du plaisir ; après, cet acte d’écrire ou de traduire, jusqu’à l’achèvement, n’est pas toujours accompagné de plaisir. A mon avis, la traduction n’est pas un travail facile, surtout si c’est de la poésie. La première fois que j’ai lu « Déjeuner du matin », le traduire, c’était, comme comprendre un secret et, pour moi, un travail impérieux. Pourquoi un secret ? Parce que le poème commence avec un pronom personnel, à la troisième personne du singulier, tandis qu’en persan, nous n’avons pas de pronom masculin non plus que féminin. Il n’y a pas de genre. Alors que devais-je faire pour que le lecteur iranien, comme le lecteur français, comprenne que le poète parle d’un homme ? Dès que j’ai trouvé une solution, j’ai ressenti un bien-être. Cet événement est à l’image des hauts et des bas qui m’accompagnent pendant toute la traduction. Surtout que Prévert, dans ses poèmes, joue beaucoup avec le langage. Tout compte fait, il y a des significations dans ses poèmes qui me font croire que Prévert est autant français qu’iranien. Parfois, il parle si bien de la condition humaine dans le monde, que je ne peux imaginer qu’il appartienne à un autre pays, à une autre culture, à une autre langue. Par exemple, pour moi, iranienne, le poème « Le Sultan » est très compréhensible : un dictateur qui a tellement assassiné de monde qu’il a peur, même dans ses rêves. Surtout que ces derniers temps, dans les informations en provenance d’Iran, nous entendons souvent que des femmes et des hommes – pour des accusations politiques, des relations amoureuses, ou encore pour des trafics de drogue – ont été exécutés.

 A chaque fois que je suis témoin de discussions violentes et tendues entre politiciens iraniens ou non iraniens, cela me fait penser au poème « Le Discours sur la paix », surtout quand Prévert écrit « Met à vif le nerf de la guerre/la délicate question d’argent ». Ou le poème « Le désespoir est assis sur un banc», qui donne le sentiment que la solitude peut frapper n’importe quel être humain, dans n’importe quel coin du monde, tandis qu’il présente le désespoir comme hors de soi. C’est comme une alerte qui annonce une épidémie de grippe. Dans chacun de ses poèmes, il y a une signification très profonde sur la situation de l’être humain dans le monde. C’est pour cela que ses poèmes me parlent, à moi dont le pays est distant de 7000 km de celui de Prévert. Mais, le poème et la compréhension de la situation commune des êtres humains éliminent les distances.

C.A. : Quels textes avez-vous choisis de traduire ? Pour quelles raisons ? Avez-vous notamment pu faire des choix de textes violemment anticléricaux, tels que « La Crosse en l’air » ?

M.R. : Vous voyez quelle est la situation de l’édition et des publications de livres en Iran. C’est très préoccupant. Un livre, qui a eu deux fois l’autorisation d’être publié et d’être diffusé, peut fort bien être interdit pour une troisième publication. Par exemple Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir qui a été traduit, publié et diffusé, et qui a eu un grand succès, a été retiré des ventes quelques semaines plus tard ; du coup très peu de gens ont eu la chance de l’acheter.

 Cet événement arrive aussi souvent pour les œuvres iraniennes, comme par exemple une partie des poèmes de Mowlana. Bien qu’il soit un poète mystique et spirituel iranien, tous ses poèmes n’ont pas eu l’autorisation d’être publiés.

 Par conséquent, l’écrivain et le traducteur iraniens essayent de trouver d’autres moyens pour éviter ces censures. Parfois, ils s’autocensurent…

Quand un traducteur décide de traduire un livre, il se demande sans cesse si son livre aura l’autorisation d’être publié ou non. Ou bien quelle partie sera supprimée.

 Pour ma traduction des poèmes de Prévert, une fois que je l’ai reçue entre les mains, j’ai su que tout ce que j’avais écrit était publié, même si je n’ai pas écrit tout ce que je voulais. Je dois avouer que j’ai dû faire un choix parmi les textes qui pouvaient aider le plus à la compréhension des poèmes. J’ai écrit et j’ai effacé, j’ai écrit et j’ai effacé, et à la fin j’ai éliminé des éléments, de peur qu’ils soient trop sensibles et qu’ils engendrent une interdiction totale du livre.

 Heureusement tous les poèmes que j’ai choisis sont restés intacts et ont été publiés.

 J’ai traduit Paroles, 81 des 95 poèmes qu’il contient. J’ai essayé d’opérer un choix parmi les différents thèmes : l’amour, les problèmes sociaux, l’humour et l’anticléricalisme, et nous savons que Prévert était fortement opposé à la religion et à l’Eglise. Nous retrouvons très clairement cet aspect dans « Pater noster ».

Dans ce poème, le commencement bouleversant m’a séduite et j’ai voulu le traduire : « Notre père qui êtes aux cieux/ restez-y/ et nous resterons sur la terre/ qui est quelque fois si jolie ».

A l’avenir, j’espère traduire les poèmes que je n’ai pas encore traduits, notamment les 14 restants de Paroles.

C.A. : Au niveau des références culturelles – parfois très liées à des événements européens du début du XXème siècle – Vous avez inséré des notes explicatives. De quel ordre sont-elles ?

 Pour quelques poèmes, j’ai essayé, avec autant de finesse et de sensibilité que possible, de replacer le lecteur iranien dans le contexte.

 Par exemple, pour « La Belle Saison », j’ai précisé que le 15 août dans le calendrier grégorien était le jour de l’Assomption, l’élévation au ciel de la vierge Marie, et que « Concorde » signifie aussi la paix et la quiétude. Vous imaginez qu’un lecteur iranien, généralement musulman, peut difficilement comprendre les allusions religieuse et historique de ce poème. Ni pourquoi le poète a choisi la place de la Concorde ! Il était donc nécessaire de lui donner quelques détails.

 Pour « Chasse à l’enfant » : le 27 août 1934, trente adolescents se sont enfuis d’une prison sur l’île de « Belle Ile » parce ce qu’ils y étaient maltraités. La police, les habitants de l’île et les touristes vont traquer les adolescents qui sont finalement tous retrouvés et renvoyés en prison.

 Il était indispensable d’insérer des notes explicatives pour « Chasse à l’enfant», « Le Retour au pays », « La Cène », « Le Combat avec l’ange », « Presque », « L’Ordre nouveau », « Epiphanie », « Pour faire le portrait d’un oiseau », « Le Temps des noyaux », « Pater Noster », « Evénement », « La Belle Saison » ou encore « Fleurs et couronnes ».

Le livre fait 277 pages, et les 79 premières sont consacrées à un approfondissement de la connaissance de Prévert dans les différents domaines de ses activités : théâtre, cinéma, collage, peinture, chansons, musique, partiellement son enfance et sa vie privée. De toutes les façons, ce livre est une première étape pour moi, et j’espère qu’à l’avenir, avec une connaissance encore plus approfondie de son oeuvre, je pourrai davantage enrichir ma présentation.

C.A. : Je crois que la traduction de ces 81 textes vous a pris quatre ans. Quelles difficultés avez-vous rencontrées pour traduire ses textes du français au persan au niveau de la langue elle-même ?  Pouvez-vous nous parler de ce travail quotidien de longue haleine qui a été le vôtre ?

 M.R. : Oui, j’ai consacré quatre années à ce livre. J’ai commencé la traduction quelques années après la fin de mes études. Il m’arrivait souvent de ne pas comprendre la totalité d’une poésie dès la première lecture, mais je sentais l’idée et l’âme du poème, et cela devenait un encouragement pour le traduire. A l’inverse, cela m’arrivait de croire qu’un poème allait se traduire facilement, mais une fois au travail je me rendais compte de la pagaïe dans laquelle je m’étais mise !

 J’ai commencé par quelques poèmes déjà travaillés par les traducteurs de la génération précédente, et, peu à peu, je me suis rendu compte de toutes les difficultés qu’ils avaient rencontrées. Ils n’étaient d’ailleurs pas toujours parvenus à faire passer les messages de Prévert.

 Pour préciser mon propos, je vous donne un exemple inverse : imaginez que quelqu’un traduise les poèmes classiques d’Hafez du persan de l’époque en français moderne.

 Prévert a beaucoup de facilité pour changer « les paroles » en poésie, mais les traductions étaient beaucoup trop éloignées de son langage. J’ai remarqué même plusieurs fautes. Alors je me suis fait aider par des professeurs francophones, et une fois certaine d’avoir bien tout intégré, j’ai commencé la réécriture.

 La deuxième partie de mon travail a consisté à m’attaquer à des oeuvres que personne n’avait encore traduites ; dans cette recherche aussi, j’ai été confrontée à plusieurs difficultés et je ne trouvais pas de solutions dans les dictionnaires. Alors, je me suis adressée aux francophones qui avaient fait des études littéraires ou philosophiques ; mais ils ne comprenaient pas toujours la signification des poèmes que je leur soumettais, et ils me répondaient alors : « Je ne comprends pas ».

Par moments, il m’arrivait d’être découragée. Puis, à force d’acharnement je finissais par trouver. Cette partie du travail fut la plus difficile.

 L’autre partie difficile, bien sûr – pas autant que la première –, c’était quand Prévert écrivait dans une autre langue, comme « Pater Noster », titre en latin. En Iran, les langues étrangères que nous connaissons sont plutôt l’anglais et l’arabe. J’ai mis du temps à comprendre que le titre du poème était en latin.

 Une fois toutes les poésies traduites, un ami traducteur, qui vit depuis longtemps en France et qui a une bonne connaissance de la langue et de la culture françaises, a tout comparé.

 Un ami poète germanophone a vérifié quant à lui les trente poèmes qu’il connaissait très bien pour les avoir traduits en allemand.

 Je les relisais pour travailler sur la musique et la beauté. J’essayais de rendre mes traductions les plus poétiques possible. Durant cette phase aussi, j’ai travaillé avec quelques poètes iraniens. Encore et encore, je retravaillais mes traductions et je modifiais les mots, les phrases, jusqu’à ce que, au bout de quatre ans, j’en sois satisfaite et que j’envoie le livre à l’éditeur.

C.A. : Au niveau de la langue, il ne doit pas être facile de traduire certains textes, notamment car ils contiennent beaucoup de jeu de mots.

 M.R. : C’était vraiment très difficile. Figurez-vous qu’en persan, nous n’avons ni féminin ni masculin et ni accents. Bien sûr, il y existe des signes pour faciliter la lecture, mais on les utilise rarement.

 Dans des conditions pareilles, que faut-il faire avec un poème comme « L’Accent grave » ? Comment le traduire ? Même avec le temps je ne suis toujours pas contente du titre que j’ai donné en persan à ce poème. Autre exemple : quand « ou » (conjonction) se change en « où » (adverbe de lieu)… Comment faire ? Encore un autre exemple : « Fleurs et couronnes ». Prévert joue avec les sens du mot « pensée », l’idée et la fleur.

 Dans le poème « Le Temps des noyaux », il y a des compositions qui posent des problèmes pour la traduction, comme « Les omnibus à chevaux, les épingles à cheveux/les omnibus à chevaux, les épingles à cheveux ». C’est très compliqué à traduire.

 La plupart des poèmes de Prévert ont leur racine dans la culture, la langue et la religion françaises, comme le poème « La Cène » qui présente le dernier dîner de Jésus avec ses apôtres. Prévert a utilisé les assiettes comme un auréole au tour de leur tête. On peut citer aussi comme exemple dans ce domaine le poème « Les Paris stupides » qui se moque des idées développées dans les Pensées de Pascal, et de la foi en Dieu du philosophe.

C.A. : Quel a été le texte le plus difficile à traduire, et pour quelles raisons ? A contrario, quel est celui que vous avez traduit sans trop de difficultés ?

 M.R. : Les poèmes d’amour étaient plus faciles à traduire, car je pense que l’amour et les sentiments qui l’accompagnent comme la sensation de liberté, à l’intérieur de l’amour, et l’aspiration de l’être humain à l’amour, sont communs à tous les êtres du monde entier. Donc, j’ai pu les comprendre et les traduire plus rapidement. C’est le cas de « Pour toi mon amour », « Cet amour », « Barbara », « Alicante » et « Chanson du geôlier ». Mais les poèmes qui avaient des dimensions historique, sociétale ou religieuse étaient plus difficiles, notamment car ils nécessitaient une recherche de ma part.

“Cet amour” traduit en persan – page 4

Cliquez ici pour entendre Maryam Raeesdana lire « Cet amour »

C.A. : Comment s’est déroulée la phase de publication de votre traduction en Iran ? Quelles sont les oppositions ou les aides que vous avez pu rencontrer ? A combien d’exemplaires votre traduction a-t-elle pu être tirée ? Comment s’est passée la diffusion de ce livre ? Cette traduction a-t-elle pu donner lieu à des lectures en persan ?

 M.R. : Les aides les plus précieuses sont venues de mes amis poètes, traducteurs, et des francophones, qui ont amélioré ma traduction.

 Un an avant mon émigration, le 4 février 2007, avec le soutien de l’éditeur et rédacteur en chef du magasine « Bokhara », MM. Raïs-Danaï et Dehbashi, et avec la participation de plusieurs hommes de lettres, et en présence de l’ambassadeur de France en Iran, nous avons organisé à la Maison des artistes un anniversaire pour Prévert qui a eu beaucoup de succès. [NDR : A ces adresses vous trouverez les comptes rendus iraniens de la soirée et des traductions de Maryam Raeesdana : http://radiozamaaneh.com/news/2007/02/post_840.html et http://tadaneh.cast.ir/files/tadaneh/2007-03-01_zhaak_prever.mp3]

 En moyenne, en Iran, chaque livre est tiré entre 1000 et 2500 exemplaires. La traduction que j’ai faite a été éditée à 1100 exemplaires et vendue 42 000 rials, soit environ 3 euros. Je ne sais pas exactement combien ont été vendus. Mais l’essentiel est que Prévert connaisse un bon succès parmi les différentes générations qui aiment la poésie.

C.A. : Comment a été reçue cette traduction par le public iranien ? Quelles furent les réactions ? Notamment de la part de la jeunesse iranienne [je me permets au passage de conseiller à tous nos lecteurs le magnifique et courageux film de Bahman Ghobadi, toujours à l’affiche : Les Chats persans] ?

 M.R. : Comme je vous l’ai signalé, les tirages de livres sont très limités. Bien sûr, la plupart des livres importants sont traduits en persan, mais pas en grande quantité. Je crois qu’en Iran comme dans n’importe quel pays au monde, les gens sont plus intéressés par le cinéma, la musique ou Internet que par le livre, plus encore en Iran qu’ailleurs. Mais, malgré cela, je peux dire que la plupart des jeunes lisent les « best-sellers ».  Du coup, les lecteurs de Prévert sont plutôt parmi les poètes et les amoureux de la poésie.

C.A. : Vous avez vécu quatre ans avec les mots et les idées de Jacques Prévert.  Je me doute que cette expérience a dû avoir un fort impact sur votre vie. Pouvez-vous nous en dire plus à ce niveau, en quoi vous a-t-elle changée ?

 M.R. : C’est exactement comme vous l’avez signalé. Je peux dire que chaque poème est tout à fait indépendant de l’autre, et chaque poème est une fenêtre sur la vie et sur le poème lui-même. Une fenêtre qui s’ouvre sur les oiseaux. J’ai commencé à m’intéresser assez tard aux oiseaux, exactement comme Prévert qui écrit : « J’ai appris très tard à aimer les oiseaux ». Et encore une fenêtre qui s’ouvre sur l’amitié et le goût de la vie. Une fenêtre qui reste toujours ouverte pour les enfants et les pauvres, pour faire rentrer l’air frais dans la poésie. Et surtout une fenêtre sur la bêtise, et une autre sur l’intelligence enfantine. Ses poèmes gardent en moi toujours cette haine de la guerre. A chaque fois que je suis en train d’écrire un poème ou une histoire, les fenêtres s’ouvrent une par une, j’entends ses Paroles, mais j’écris avec mon monde à moi, une iranienne qui a passé son enfance avec la révolution, son adolescence avec la guerre et sa jeunesse avec les soubresauts politiques de son pays.

C.A. : Quel est votre texte préféré de Jacques Prévert ? Pourquoi ?

 M.R. : Je ne peux pas citer un poème précis, mais je peux grouper mes préférences. D’abord les poèmes d’amour et puis les poèmes qui parlent de la paix et de l’amitié. Mais le poème « Le désespoir est assis sur un banc » me touche beaucoup ; il vit avec moi, il m’accompagne en permanence.

“Le désespoir est assis sur un banc” en persan

Cliquez ici pour entendre Maryam Raeesdana lire « Le désespoir est assis sur un banc »

C.A. : Si vous deviez définir l’œuvre de Jacques Prévert en quelques mots, que diriez-vous ?

 M.R. : L’amour envers l’amour, envers l’être humain, la liberté, la paix, et la haine de la guerre et de la religion.

Paris, le 26 février 2010

Un grand merci à Maryam Cadiot pour sa précieuse aide linguistique

Jacques Prévert traduit en Iran : entretien avec Maryam Raeesdana

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